Intello Notes sur l'alcool, ses bénéfices pour quelques-uns

PoulpeDeNoel

Fdp de modo
Membre du personnel
Les drogues peuvent induire à des états psychiques particuliers, dont un homme de valeur pourrait tirer profit. Beaucoup de sociétés utilisaient des drogues. Leur utilisation était souvent régulée de manière complexe, parce qu’en retirer des bénéfices est, de fait, complexe.

Je vais donc lister quelques bénéfices particuliers dont un certain type d’hommes pourrait user. Je parle bien des bénéfices pour un homme qui aurait une capacité de réflexion sur les expériences qu’il vit.

Dans le cas de l’alcool, je classerai ces éléments en deux parties.


1) Plonger en soi

Pour parler en termes freudiens, l’alcool me débarrasse de mon surmoi. En enlevant régulièrement ce drap, on peut en apprendre davantage sur soi-même, sur certaines parties de soi. Faire l’expérience d’une plus grande connexion avec son « ça », c’est apprendre à mieux vivre avec, quand on ne fait que le frôler au quotidien. Pour faire une analogie : un cavalier ne connaît son cheval que lorsqu’il sait quand il veut faire ses ruades, qu’il est au point limite de la désobéissance. Et pour parvenir à cette connaissance de son cheval, le plus simple, c’est encore de le voir faire ses cabrioles, de remarquer par quels signes on peut le voir à deux doigts de faire n’importe quoi.

D’ailleurs, plus on connaît, de manière exhaustive, le panel de ses « possibilités d’être », mieux on peut déterminer ce qui constitue les hauteurs de soi-même.

Et puis, je crois aussi qu’un certain type d’homme cherche à vivre extrêmement.
Toucher les points les plus abrasifs de lui-même.
Attention, je suis pas en train de faire une distinction entre le type de l’ascète et le type du « borderline » ; à mon sens, l’ascète vit extrêmement, en ce qu’il cherche à atteindre en lui des profondeurs extrêmes, à atteindre, même, certains points de rupture. Le but pour l’ascète et le borderline, c’est un peu de rompre avec eux-mêmes. Plus précisément, pour l’ascète, c’est rompre avec son ego (dans le sens bouddhique du terme, vous voyez). Pour le borderline, c’est quelque chose du genre aussi. C’est dépasser, je crois, ce qu’il y a d’inerte en lui. Seulement, il le fait de manière trop irréfléchie pour coller avec le type d’homme dont je parle. Pour ce dernier, quand il est bourré, c’est comme s’il régénérait quelque chose en lui. Comme si en te réveillant le lendemain, tu prenais une nouvelle peau.


2) Découvrir le monde sous un autre jour

S’abandonner à ce qu’il se passe, se laisser porter, se détacher de ses valeurs et de ses a priori sur le monde.
Apprendre à se détacher de la vie, de la manière la plus extrême, ça permet, pour plus tard, sur la durée, de mieux considérer ce qu’elle a de contingent, de véritablement peu important. Et donc de se concentrer sur l’essentiel.

De plus, l’alcool exacerbe ma sensibilité. Je pense qu’on pourrait faire un blabla scientifique : je crois me souvenir que la connexion de tes neurones, en certaines parties, est accélérée. Du coup tu peux mieux analyser l’art, mieux ressentir ce qu'un tableau a de profond, mais sans pouvoir mieux mettre de mots dessus, loin s’en faut.

En plus de l’art, la sensibilité est augmentée de manière générale. Le mec bourré va pouvoir développer des idées à valeur plus sensible, des idées basées non plus sur des faits rationnels, mais sur une sorte d’intuition sans valeur scientifique.

Et puis quand t’es rogné à une terrasse, t’as comme on dirait, une nouvelle vision sur les choses, comme si tes yeux regardaient les choses sous un angle différent, mais sans que ça ne fausse ton regard elles : c’est comme si tu découvrais à leur essence un nouveau plan. C’est un changement très subtil, et j’ai extrêmement de mal à mettre des mots là-dessus. Peut-être que plutôt que de parler de changement de plan, on pourrait dire que tu regardes les choses plus profondément. Tu peux fixer ton regard sur une chaise et en extirper davantage d’informations. Plutôt que de simplement regarder les quatre pieds de la chaise, tu peux en retirer certains sentiments, certaines idées, certaines vérités ; enfin, tu vois mieux la beauté de la chaise.
Enfin bon je vais pas faire une phénoménologie du mec bourré, mais c’est l’idée.


Les limites :

Bien sûr y a des limites à l’alcool et ça peut te faire du mal. Mais à tout mal, ses bénéfices, dont je cite quelques exemples ici. Tu peux aussi limiter les maux de l’alcool et maximiser ses bienfaits si tu t’y prends bien. Perso, je suis pas sûr que la lucidité soit toujours bénéfique, ou en tout cas, que l’absence de lucidité soit toujours un tort : mais par contre, je pense qu’au préalable de la boisson, il faut penser à ton usage de celle-ci.

J’ai pas non plus parlé des bénéfices sociaux de l’alcool, le but c’était vraiment d’évoquer en quoi l’alcool pouvait psychologiquement être intéressant.
 

Tigrou

Fdp d'admin
Membre du personnel
Le premier point ne serait pas considéré comme un bénéfice par les sociétés traditionnelles. Au contraire, ce seraient même le genre de choses que l'encadrement est censé éviter. (D'ailleurs, il me semble dangereux de vouloir atteindre seul un résultat qui est atteint de manière encadrée, de manière générale.) Le but de l'usage rituel de certaines substances est d'accéder aux niveaux supérieurs de l'être, pas de tomber dans les régions inférieures du psychisme. Être encore plus en contact avec son surmoi, plutôt que de s'en couper. Détruire le Ça, ou au moins le mettre au pas, plutôt que de jouer à Dr Jekyll curieux des conneries que fera son Mr Hyde. :noel:

Pour le deuxième point, j'ai surtout l'impression que ce sont des sensations mentales illusoires plus qu'une réalité. Pour les personnes sobres qui parlent à une personne rognée, ou sous l'effet d'autres substances, ce qui lui paraît des intuitions profondes semblent au contraire n'être que des divagations fiévreuses sans grand intérêt. De toutes les grandes idées, ou les grands monuments artistiques, de l'humanité, je serais surpris qu'il y en ait plus qu'une petite poignée qui aient été produites dans ces conditions. :noel:
 

Sprite

Membre validé
Alors oui, mais l'alcool inhibe les sensations aussi.
Du coup alcool = moins de sexe.
Et moins de sexe c'est relou
Je crois
 

PoulpeDeNoel

Fdp de modo
Membre du personnel
Le but de l'usage rituel de certaines substances est d'accéder aux niveaux supérieurs de l'être, pas de tomber dans les régions inférieures du psychisme. Être encore plus en contact avec son surmoi, plutôt que de s'en couper. Détruire le Ça, ou au moins le mettre au pas, plutôt que de jouer à Dr Jekyll curieux des conneries que fera son Mr Hyde. :noel:
Y a pas mal de rituels religieux (surtout dans les religions dites primitives, mais pas que) qui cherchent à atteindre un état frénétique, des états où se perd la conscience.

(D'ailleurs, il me semble dangereux de vouloir atteindre seul un résultat qui est atteint de manière encadrée, de manière générale.)
C'est vrai que ça peut être dangereux, et c'est aussi pour ça que j'ai dit que mon texte n'était réservé qu'à un certain type d'hommes, qui part avec une certaine disposition d'esprit. Certains hommes ont soif de découvrir certains états de conscience ; or, il n'existe plus pour eux d'encadrements rituels suffisants. Ils peuvent bien faire quelques trucs solo quand même.

Pour le deuxième point, j'ai surtout l'impression que ce sont des sensations mentales illusoires plus qu'une réalité. Pour les personnes sobres qui parlent à une personne rognée, ou sous l'effet d'autres substances, ce qui lui paraît des intuitions profondes semblent au contraire n'être que des divagations fiévreuses sans grand intérêt. De toutes les grandes idées, ou les grands monuments artistiques, de l'humanité, je serais surpris qu'il y en ait plus qu'une petite poignée qui aient été produites dans ces conditions. :noel:
Je ne dis pas que l'alcool va permettre de créer, sur le moment, de grandes oeuvres ; je dis que l'alcool peut alimenter ta sensibilité et ton acuité artistique. C'est après avoir bu, quand tu seras sobre, que tu créeras, et peut-être un petit peu mieux grâce à ton expérience de l'alcool.
 

Tigrou

Fdp d'admin
Membre du personnel
Y a pas mal de rituels religieux (surtout dans les religions dites primitives, mais pas que) qui cherchent à atteindre un état frénétique, des états où se perd la conscience.
Tous les états modifiés de conscience ne sont pas équivalents, padamalgame. :noel:
 

Arexi

Membre
J'aime bien en boire de temps en temps pour évacuer le stress et l'angoisse.

Surtout pour atteindre une forme d'ivresse apaisante, une forme d'euphorie mais sans être en état d'ébriété pour autant. Comme l'on planait vers une existence supérieure.

Mais bien sûr attention à ne pas en abuser. Sinon cela devient néfaste.
 

Albinoel

Pilier
J'aime bien en boire de temps en temps pour évacuer le stress et l'angoisse.

Surtout pour atteindre une forme d'ivresse apaisante, une forme d'euphorie mais sans être en état d'ébriété pour autant. Comme l'on planait vers une existence supérieure.

Mais bien sûr attention à ne pas en abuser. Sinon cela devient néfaste.
Fais très attention si tu bois pour évacuer le stress ou l'angoisse, même si c'est seulement occasionnel pour l'instant, c'est l'un des "drapeaux rouges" qui font que le risque de devenir alcoolique augmente.
 

Tigrou

Fdp d'admin
Membre du personnel
Si l'alcool c'est ton refuge, et qu'un jour tu te retrouves dans une situation de gros stress chronique, le risque de glouglouglou devient énorme. :ok:

Et les situations de gros stress chronique, c'est une question de "quand" plutôt que de "si".
 

Tigrou

Fdp d'admin
Membre du personnel
Je vais reformuler mes critiques, mais en les détaillant un peu plus. Comme je disais auparavant, je considère que le premier point est vrai mais peu enviable, et que le deuxième point est une illusion de la subjectivité.

I. Toutes les expériences de vie ne valent pas forcément la peine d'être vécues. Je n'ai par exemple aucunement l'envie de souffrir d'incontinence anale, et il me semblerait aberrant que quelqu'un se vante d'être dans un tel état. Le simple fait que l'état alcoolisé soit un état d'être ne le rend donc pas enviable pour autant.

Rien ne garantit qu'avoir une plus grande connexion avec sa part d'ombre permette "d'apprendre à mieux vivre avec". Pour filer la métaphore, je n'ai pas connaissance d'un cavalier qui aurait fait boire son cheval pour mieux le connaître. Savoir ce qui fait faire des cabrioles au cheval quand il est alcoolisé, ça n'a d'utilité que si et seulement si les mêmes motifs provoquent la même réaction quand il est sobre. Mais auquel cas, à quoi bon le faire boire ? On peut donc douter de la valeur des données obtenues par ce genre d'introspection.

La description du type d'homme pour lequel cela présenterait des avantages est parlante. Il cherche à vivre extrêmement, à toucher les points les plus abrasifs de lui-même, et est comparé avec un ascète. De plus, il est dit plus tôt qu'il cherche à côtoyer sa part d'ombre. Un tel profil ressemble avant tout à un homme autodestructeur. Si nous voulons dire que l'alcool aide les autodestructeurs à accomplir leur but, alors effectivement, je ne le nie pas. Cependant, je ne pense pas que ce soit là quelque chose de louable.

II. Quand Poulpe écrit "mieux analyser l'art", je pense qu'il veut dire "mieux ressentir l'art", et que s'il ne l'a pas dit comme ça, c'est simplement pour éviter une répétition. L'art a deux aspects : un côté esthétique, c'est-à-dire émotionnel et sensitif, et un côté cognitif. Comme "ce qui se conçoit bien s'énonce clairement" (Boileau), on pourrait penser que s'il s'agissait d'une analyse cognitive, il n'aurait pas de mal à "mettre des mots dessus". Il s'agirait donc plutôt d'une expérience émotionnelle, purement subjective, et qui ne va sans doute pas persister une fois la sobriété revenue. Mais auquel cas, l'observation devient moins intéressante. Nul ne doute que les gens boivent parce que cela provoque une sensation agréable. Dire que ça en provoque également devant un tableau, qu'est-ce que ça apporte de plus ?

Le capitaine H. H. Robinson, dans ses mémoires sur la prise d'opium, raconte qu'il avait voulu mettre à l'écrit les vérités profondes qui se présentaient à lui. En voici une : « La banane est grande, mais la peau de banane est plus grande encore. » Je pense que tous ceux qui ont déjà été sobres à côté de gens rognés seront d'accord pour dire que c'est ce genre de banalités qui sont dites par les personnes dans un état second. Que ces babillages donnent l'impression d'être très profonds dans un état où la lucidité est abolie, je n'en doute pas. Qu'il y ait là-dedans quoi que ce soit de réellement profond, j'en suis tout de suite beaucoup moins convaincu. C'est sans doute pour ça que Poulpe insiste sur l'aspect incommunicable de ces impressions : les mots n'en sont jamais qu'une approximation très maladroite, d'où cette impression de ridicule. Mais je ne pense pas qu'il suffisse qu'une expérience soit ressentie comme profonde pour l'être réellement.

Il en va de même pour la chaise. L'esprit alcoolisé s'attarde sur la chaise, et, n'étant pas lucide, ne trie pas automatiquement les informations triviales de celles qui sont susceptibles d'être intéressantes. C'est ce qui produit ce phénomène de "bug", où les gens dans un état second paraissent comme fascinés par des objets du quotidien. J'ai malgré tout l'impression que si un philosophe passait autant de temps qu'eux, mais sobre, sur le même objet, il en produirait une analyse tout de suite plus profonde. Ça pourrait être le cas de Poulpe d'ailleurs, qui est loin d'être bête. Est-ce que, s'il avait passé autant de temps à observer la chaise sobre que rogné, il n'aurait pas produit des analyses plus pertinentes ?

Tout ceci présente des analogies avec le dopage. La personne qui se dope veut avoir les résultats de l'exercice, mais au lieu de devoir s'y adonner avec efforts et discipline, elle préfère choisir une voie de facilité et obtenir une victoire facile par l'usage de moyens pharmaceutiques. C'est un thème que l'on retrouve souvent dans l'utilisation de drogues dans le but d'atteindre une sorte de profondeur. Il y aurait un parallèle à faire avec la consommation d'opium par le mouvement décadentiste. "Vie = Rêve ; Opium = Réalité"

P. D. Ouspensky disait, il y a déjà un certain temps : « Et ainsi, au lieu de perdre un jour entier en exercices comme le yogi, une semaine en prières comme le moine, et un mois en supplices comme le fakir, l'homme qui suit la quatrième voie se contente de préparer et d'avaler une petite pilule qui contient toutes les substances requises, et de cette façon, sans perdre de temps, il obtient les résultats voulus. »

Les stéroïdes ont au moins l'avantage de vraiment donner un corps musclé, en échange de leurs effets secondaires. Mais j'ai l'impression qu'en échange des effets secondaires des drogues, on n'a qu'une impression de profondeur. Je conseillerais donc aux gens qui seraient tentés par ça d'arrêter d'essayer de tricher et de plutôt aller à la salle métaphorique. Hop hop hop, on commence le long travail qui amènera des résultats réels, au lieu d'espérer une formule miracle qui ne marche à première vue pas très bien. :noel:

Note complémentaire : Même si tout cela était vrai, on pourrait se demander si le jeu en vaut la chandelle. Le médecin Théodore Dalrymple a écrit que la principale cause de consommation de drogues est que les gens n'ont plus de raison de vivre, mais aussi que la deuxième est ce genre de discours apologétique, qui se retrouve à peu près à l'identique pour différents produits, comme le cannabis ou l'héroïne. Même à un niveau individuel, ces quelques avantages (s'ils en sont vraiment) valent-ils les effets négatifs qui vont avec ? Et à un niveau collectif, est-il bien raisonnable de propager ce genre d'apologétique ? Il est important de poser ouvertement la question, car même si le topic a été formulé avec beaucoup de réserves (en mentionnant les dangers de l'alcool, en disant que ce n'est pas pour tout le monde, etc.), j'ai déjà vu Poulpe y renvoyer quand il recommendait aux gens de boire.

« Ils t'interrogent sur le vin et les jeux de hasard. Dis : "Dans les deux il y a un grand péché et quelques avantages pour les gens ; mais dans les deux, le péché est plus grand que l'utilité". »
— Coran 2:219
 
Haut